Alors que ce projet, vieux de 20 ans, refait surface depuis quelques mois, notre association souhaite ouvrir le débat :
Nos partenaires italiens, au contraire de ce que l’on peut entendre, n’ont pas beaucoup avancé. Alors que nos 3 descenderies sont en passe d’être terminées (coût environ 900 millions d’euros), les Italiens n’ont toujours pas creusé la leur et l’approbation de leur projet préliminaire attend désespérément d’être finalisé. De nombreux habitants du val de Suse s’opposent à ce projet, inquiets des dangers sanitaires liés à l’extraction à l’air libre de centaines de milliers de tonnes de roches radioactives et amiantifères découvertes le long du tracé.
Le coût de ce projet (150 kms de tunnels et tranchées couvertes, voies, gares, aménagements antibruit, rachats de propriétés, contournement ferroviaire de Lyon...) peut être chiffré, avec les surcoûts habituels, aux alentours des 25 milliards d’euros. Ainsi, le coût du tunnel de base du Mont d’Amblin (53 kms), qui relierai l’Italie et la France, a été estimé, à 9 milliards d’euros. Alors que l’Europe vient récemment de menacer de réduire ses aides, au profit « d’autres projets plus crédibles et plus efficaces », comment va-t-on payer cette facture?
Difficile d’être optimiste. La SNCF avoue d’elle-même qu’elle perd de l’argent sur 20% des lignes TGV. Quand à RFF, avec ses 30 milliards de dettes, ses recettes arrivent à peine à couvrir 83% de ses besoins pour entretenir le réseau existant.
Comment va-t-on pouvoir amortir ce projet alors que chacun a en mémoire le gouffre que fut Eurotunnel? La récente rénovation de la « ligne des Carpates » a permis de relier Genève à Paris en 3h05, de ce fait aucun voyageur du bassin genevois n’empruntera le Lyon-Turin. Les ouvertures des tunnels suisses du Lötschberg (2011) et du St Gothard (2015) et celle du tunnel autrichien du Brenner (2018) devraient, quant à elles, permettre d’absorber le fret nord sud européen des 25 prochaines années D’autre part la justification préalable datant du début du projet (le doublement du trafic transitant par les Alpes françaises) s’est révélée fausse. Ce trafic stagne depuis plus de 10 ans.
Pour autant des problèmes persistent et doivent être résolus. Tout d’abord la liaison voyageur Chambéry-Lyon doit être améliorée. Les besoins se situent surtout au niveau d’un TER efficace. Au lieu de dépenser des milliards d’euros dans un TGV, pourquoi ne pas améliorer l’existant? Le doublement des 43 kms de ligne entre Saint André le Gaz et Chambéry permettrait de réduire fortement le temps de trajet, d’assurer la ponctualité, de garder et d’améliorer les dessertes de l’avant pays savoyard tout en minimisant les travaux d’infrastructure et les couts du matériel roulant (une rame TGV coute 30 millions d’euros contre 8 millions pour une rame TER). En ce qui concerne le Fret, la CIPRA (Commission Internationale pour la Protection des Alpes) affirme qu’en modernisant et sécurisant les infrastructures existantes, on peut faire transiter 20 millions de tonnes de marchandises par le rail au Montcenis, ce qui équivaut aux trafics cumulés routiers et ferroviaires actuels. Ce projet de rénovation se chiffrerait à 1 milliard d’euros .
Alors que faire ? Notre association, au fur et à mesure qu’elle s’est intéressée à ce projet, est devenue dubitative sur l’intérêt qu’il offrait à notre département. C’est pourquoi, nous organiserons, dans les mois à venir, une réunion publique afin qu’une réflexion nouvelle , faite avec les données d’aujourd’hui et non pas les prospectives d’il y a 20 ans , puisse se faire jour.